De Downing Street aux millions : l’après-mandat doré de Boris Johnson

Après avoir quitté Downing Street, Boris Johnson a bénéficié d’une subvention publique, censée financer ses devoirs honorifiques, mais qui aurait aussi servi à gérer contrats privés et discours rémunérés, faisant naître de sérieux doutes éthiques.
Des documents confidentiels, révélés par The Guardian, mettent en lumière la manière dont Boris Johnson a transformé ses réseaux acquis à Downing Street en une véritable machine commerciale. Ce qui frappe, c’est l’aisance avec laquelle l’ex-Premier ministre britannique semble avoir utilisé un bureau financé par une subvention publique, censée couvrir ses fonctions honorifiques, pour orchestrer conférences rémunérées, contrats et rencontres au sommet.
Parmi les révélations les plus marquantes : Boris Johnson a contacté un haut responsable saoudien pour lui demander de transmettre une proposition commerciale au prince héritier Mohammed ben Salmane au nom d’une société dont il était lui-même coprésident. Dans un autre cas, il a touché plus de 200 000 livres sterling d’un hedge fund après une rencontre avec le président vénézuélien Nicolas Maduro, alors qu’il affirmait publiquement ne pas avoir été rémunéré.
Les documents révèlent également une réunion secrète avec le milliardaire Peter Thiel, fondateur de Palantir, quelques mois avant que cette entreprise américaine ne se voie confier un rôle clé dans la gestion des données sensibles du National Health Service (NHS), le système public de santé britannique. L’ancien Premier ministre a par ailleurs organisé un dîner privé en novembre 2020, peu après l’entrée en vigueur du deuxième confinement lié au Covid, en présence d’un pair conservateur qui avait financé la rénovation luxueuse de son appartement officiel à Downing Street.
L’ensemble des fichiers, plus de 1 800 au total, met en évidence l’ampleur de la confusion entre mission publique et intérêts privés. The Guardian note qu'officiellement, les anciens Premiers ministres bénéficient d’une enveloppe annuelle destinée à couvrir les charges liées à leurs fonctions honorifiques. Mais dans le cas présent, tout indique que cette aide publique a servi de levier pour piloter des activités commerciales. Or, la règle est claire : il est interdit de transformer les relations gouvernementales en capital personnel.
Des discours à plusieurs millions
Entre septembre 2022 et mai 2024, Johnson aurait encaissé plus de 5 millions de livres pour 34 discours à travers le monde. Billets en première classe, hôtels cinq étoiles, cachets vertigineux : l’ancien chef du gouvernement s’est bâti une carrière privée lucrative, mais sous la surveillance embarrassée des autorités de contrôle. Ce mélange des genres rappelle des scandales passés et nourrit un soupçon persistant : l’argent public aurait été instrumentalisé pour faciliter des deals privés.