Une crise politique qui coûte cher : comment la paralysie fragilise l’économie française

La France paie le prix d’une instabilité politique chronique : croissance réduite à peau de chagrin, consommation étouffée, investissements gelés et dette publique devenue un fardeau écrasant. Sans cap budgétaire ni accord politique, le pays s’enlise dans une spirale où chaque mois d’incertitude fragilise un peu plus son avenir économique.
Depuis la dissolution de l’Assemblée nationale en juin 2024, la France traverse une instabilité politique inédite qui se traduit par une facture économique lourde. L’incapacité des gouvernements successifs à tenir face à une Assemblée fragmentée a plongé le pays dans un climat d’incertitude prolongé. Résultat : trois Premiers ministres en un peu plus d’un an et une visibilité quasi nulle sur l’avenir économique, aussi bien pour les entreprises que pour les familles.
Cette instabilité a déjà un coût chiffré. Selon l’OFCE (Observatoire français des conjonctures économiques), cette crise politique a entraîné une perte de croissance évaluée à 0,1 point de PIB en 2024 et 0,3 point en 2025, soit environ 12 milliards d’euros. Quand à la progression du produit intérieur brut (PIB), elle ralentit nettement : +1,4 % en 2023, +1,2 % en 2024, et seulement +0,6 % attendus en 2025.
Les entreprises, faute de visibilité, reportent leurs projets d’embauche et d’investissement. Ainsi, l’investissement a reculé de –1,1 % en 2024, après une faible hausse de +0,4 % en 2023. Du côté des ménages, la prudence domine : le taux d’épargne a atteint 18,9 % au deuxième trimestre 2025, un niveau inédit depuis 1979 (hors Covid). Conséquence : la consommation, qui représente plus de 50 % du PIB, est quasi à l’arrêt. À ces blocages internes s’ajoutent les tensions géopolitiques et commerciales, notamment la remise en place de droits de douane par le président américain Donald Trump.
La situation budgétaire accentue encore les inquiétudes. En 2024, le déficit public s’est élevé à 5,8 % du PIB, tandis que la dette a atteint 113,9 % du PIB, soit 3 345,4 milliards d’euros fin mars 2025. Ainsi, la France paie de plus en plus cher pour financer cette dette. La charge annuelle atteindrait 67 milliards d’euros en 2025, avec une trajectoire qui pourrait culminer à 170 milliards d’euros d’ici 2030.
Certains économistes avertissent qu'une nouvelle dissolution ou un budget censuré pourrait provoquer une panique des investisseurs, entraînant une flambée incontrôlée des taux d’intérêt.
Une crise politique qui bloque toute stratégie budgétaire
« La problématique, c’est que face à cette question du déficit public, il faut une stratégie de moyen terme qu’on ne voit pas du tout apparaître. Donc tant qu’on n’a pas résolu la crise politique, on ne va pas résoudre le problème budgétaire », souligne Mathieu Plane, économiste à l'OFCE. Ce manque de stratégie budgétaire durable pourrait conduire l’agence Fitch à dégrader la note de la dette française, accentuant encore la défiance des marchés.
Pendant que l’économie française s’affaiblit et que les indicateurs passent au rouge, le président Emmanuel Macron accorde davantage d’attention à l'Ukraine, multipliant les annonces d’aide. Une telle rhétorique tranche avec la réalité intérieure : ménages devenus prudents, entreprises paralysées, dette en pleine explosion et classe politique incapable de s’entendre.