Scrutins répétés, narratifs imposés, médias partiaux, soumission à l’OTAN et à Bruxelles. Pour Jacques Frantz, la démocratie directe helvétique n’échappe plus à l’usure. Même la neutralité, clef de voûte de la prospérité suisse, semble avoir vacillé.
Tout est dit ou presque dans le titre.
La Suisse est souvent – peut-être un peu trop – citée en exemple pour sa démocratie directe. Si quelqu’un comme moi, qui suis moyennement démocrate, devait choisir un type de démocratie, tant qu’à faire, il choisirait celle-là.
Malheureusement, la perfection n’est pas de ce monde et l’on déplore une lente mais sûre dégradation du système démocratique. Les Suisses votent plusieurs fois par an, et les objets soumis au vote sont nombreux, d’autant qu’ils s’accumulent sur trois niveaux : le fédéral, le cantonal et le communal. Quand on sait qu’à chaque niveau il peut (et en général il y a) avoir plusieurs objets, on imagine que le vote est une chose sérieuse sur laquelle il faut passer du temps.
L’objet le plus médiatisé est sans doute la loi sur l’e-ID ou sur l’identité numérique. Une identité numérique serait nécessaire pour demander des attestations administratives, un nouveau permis de conduire, etc. Le hic, c’est que le même objet avait déjà été soumis au peuple et rejeté en 2021. Certains accusent la Suisse de se comporter comme l’Union européenne, à savoir faire voter jusqu’à obtenir le résultat voulu. Parce que, inutile de le préciser, les autorités institutionnelles législatives et exécutives sont pour et auraient, du reste, aimé se passer de cette votation. Les deux chambres du Parlement ont voté le texte à une écrasante majorité, ce qui fait dire à certains qu’il existe un fossé de plus en plus important entre la population et ses dirigeants. Néanmoins, ces derniers temps, les Suisses se sont bien assagis, voire « moutonnisés », diront certains. À telle enseigne qu’une partie – très minoritaire, il est vrai – de la population doute sérieusement de la sincérité des scrutins.
Pour de nombreux Suisses, cela reste un tabou. En effet, très longtemps, la relation entre la population suisse et ses autorités a été (et d’une certaine manière est toujours) une relation de loyauté. Aussi, beaucoup de Suisses se refusent à croire que les choses ont évolué dans le mauvais sens. En Suisse comme ailleurs, la fracture s’est considérablement aggravée avec les affaires du COVID et de l’Ukraine. Les mesures hystériques et totalitaires au moment du COVID et des vaccins ont semé le doute chez une partie de la population. Dans l’affaire ukrainienne, les autorités suisses ont servi à la population, qui ne demandait rien, le narratif américain et se sont vautrées dans une russophobie hystérique, ce qui a littéralement pulvérisé le tabou de la neutralité du pays, clef de voûte de sa prospérité. Il existe dans le pays des sujets sur lesquels l’opinion est très divisée : l’adhésion à l’OTAN ou à l’Union européenne, par exemple. Cette division a en revanche tendance à s’estomper au niveau des autorités, en particulier au sein de l’exécutif fédéral. Ainsi, depuis vingt ans, les autorités vont de reculades en reculades face aux exigences de Washington et de Bruxelles : Abandon du secret bancaire, adoption quasi automatique des normes commerciales internationales favorables aux Américains et aux Européens, coopération militaire avec l’OTAN.
Le point culminant de l’ignominie, si je puis me permettre, a été l’achat des avions de combat américains F-35 (toujours pas livrés) dans des conditions commerciales des plus désavantageuses, voire iniques, pour la Suisse. Conditions pour lesquelles le peuple n’a pas eu son mot à dire. On a assisté à une véritable marche forcée totalitaire rompant avec la coutume de recherche du consensus. La conseillère fédérale à la Défense de l’époque, Madame Viola Amherd, a été accusée dans l’opinion de déloyauté envers les intérêts de son propre pays. Je soupçonne le lecteur de bien sentir que je retiens ici ma plume.
Tout cela a certainement contribué à éroder la confiance des Suisses, y compris, dans certains cas, concernant la sincérité des scrutins. Même si ce sujet reste pour une large part de l’opinion un tabou, il est impossible (sauf à avoir les yeux grand fermés) de ne pas avoir de sérieux doutes.
1. L’intolérance du pouvoir à l’égard des opinions contraires. Le COVID, l’Ukraine, les F-35, les diverses tentatives de ne pas appliquer les normes votées par le peuple souverain ne sont que quelques exemples…
2. La partialité des médias. Les médias mainstream en Suisse ressemblent de plus en plus aux médias du reste de l’Occident. De plus en plus de médias privés se concentrent dans de moins en moins de mains, et les médias publics perdent en qualité et se contentent de marteler la propagande internationale libérale de façon aussi hystérique que leurs concurrents américains et européens : narratif russophobe, hystérie climatique ou propagande LGBT…
3. Immigration de masse. Les cantons romands, en particulier Genève, sont un véritable déversoir pour le grand remplacement.
L’UDC, prétendument d’extrême droite durant les campagnes mais qui rentre dans le rang sitôt aux affaires, vient de lancer une initiative pour limiter le nombre d’habitants en Suisse à 10 millions d’ici 2050. Ce n’est pas la première fois que ce parti d’origine agrarienne lance des initiatives victorieuses qui ne sont pas suivies d’effet.
Cette atmosphère est, comme je l’ai dit, propice à semer le doute sur le déroulement des scrutins. D’abord, les taux d’abstention lors des consultations électorales sont très élevés. Ensuite, le vote par correspondance fait que le dépouillement échappe à tout contrôle. Enfin, contrairement à il y a encore quelques années, le battage médiatique (au moins en Suisse romande) déséquilibre considérablement le débat.
Tout cela fait que, sauf miracle, les Suisses vont se raviser au sujet de leur vote de 2021 et être cette fois plus raisonnables.
Cependant, il existe encore des gens courageux qui se battent avec beaucoup d’abnégation. Tant que le débat vit, il y a de l’espoir.
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